Ce récit en plusieurs parties est destiné à expliquer mes origines, et comment j'ai été amené à devenir un Gaumuniste.
J'étais un jeune Gaulois comme les autres. Un gamin de 7 ans, innocent et inconscient, haut comme trois pommes.
Je vivais heureux avec ma famille constituée de mes deux parents, mes quatre soeurs et mes trois frères (quant à moi j'étais le petit dernier), parmi les gens de mon village natal que je connaissais tous depuis toujours.
Tout était paisible, simple et joyeux (nous avions même parfois de la couenne de sanglier séchée au repas du dimanche, c'est dire !)...Jusqu'au jour où....
Jusqu'au jour où une troupe de Romains eut la sale idée de faire halte devant notre village et de le mettre à sac !!!
Ils entreprirent de piller les chaumières les unes après les autres, et massacraient les villageois qui tentaient de s'opposer : c'était peine perdue, que pouvaient faire de simples péons contre des militaires parfaitement équipés?
Quand vint le tour de notre maison, Maman me cacha à l'intérieur d'un tonnelet de cervoise vide. J'étais le plus petit de la famille, mais j'eus néanmoins du mal à entrer entièrement dans la barrique. Heureusement, Maman réussit à refermer le couvercle à l'instant-même où un Romain entrait dans la maison, l'épée à la main.
Les instants qui suivirent me parurent une éternité, dans le noir complet du tonneau. J'entendais des bruits de lutte, je reconnus les cris de ma mère et de plusieurs de mes frères et soeurs, puis soudain : plus rien.
Finalement, une sorte de bruissement se fit entendre, en même temps qu'une odeur insistante : le feu ! Les Romains, ayant commis leurs méfaits, avaient décidé de brûler entièrement le village avant de repartir.
Il me fallait à tout prix quitter ma cachette, qui pouvait se transformer en un piège mortel d'un instant à l'autre! Je sentais déjà la chaleur envahir la pièce, et la sueur perler sur mon front. En basculant d'un côté puis de l'autre, je réussis finalement à faire tomber le tonnelet sur le côté, et son couvercle s'ouvrit avec le choc.
En sortant du tonneau, ce fut une vision d'horreur : mes grands frères et mon Papa, allongés sur le sol, inanimés. Tous avaient au niveau de la poitrine une tache rouge vif qui s'agrandissait à vue d'oeil sur le tissu déchiré de leurs gilets.
Papa, Multix, Felix, Artix....morts ! Je sentais ma gorge se serrer, les larmes monter, et je restais là, tétanisé par la douleur.
Ce fut la chute du toit de la chaumière du voisin, dévorée par les flammes, qui réveilla en moi l'instinct de survie : je sortis en courant de ce qui ne serait bientôt plus qu'un tas de cendres ainsi que le tombeau d'une partie de ma famille, et me dirigeai vers la rivière en contrebas du village, à l'opposé de la route par laquelle étaient venus les envahisseurs.
Le village était jonché de cadavres : tous des hommes. Mais aucun être humain encore en vie à part moi.
Tout en courant, mes pensées défilaient à toute allure : où étaient Maman et les filles? En moi-même, j'espérais de tout mon coeur qu'elles n'aient pas subi le même sort que tous ces pauvres hères reposant au village.
Il faut bien se dire qu'à 7 ans, je n'imaginais pas la valeur que pouvaient avoir des femmes pour ces soldats partis depuis plusieurs années en campagne militaire.
Une fois arrivé au cours d'eau, je pris la petite barque qui servait habituellement de bac pour aller du côté de la forêt; mais plutôt que de passer sur l'autre rive, je la dirigeai dans le sens du courant et me laissai dériver, allongé au fond de l'embarcation, à bout de forces. La douceur du soleil d'un après-midi de printemps, ainsi que le son du clapotis de l'eau et les chants de oiseaux, mais aussi l'état de choc, m'envoyèrent rapidement dans les bras de Morphée.
Je ne sais combien de temps j'ai dérivé sur la rivière, inconscient. Quand j'ouvris les yeux, je n'étais plus du tout sur la barque, ni même à l'air libre. Je croyai tout d'abord avoir rêvé l'attaque des Romains, car j'étais allongé dans un lit, à l'intérieur d'une petite pièce que je pris pour ma chambre. Mais une seconde analyse rapide des lieux annihila toutes mes espérances : je ne reconnaissais pas la chambre, et aucun des objets qui m'entouraient ne m'étaient familiers.
La réalité me revint alors, froide et implacable : je n'avais pas rêvé, le massacre avait vraiment eu lieu ! Une profonde tristesse s'empara alors de moi, et je me mis à sangloter doucement.
C'est à ce moment qu'un inconnu pénétra dans la pièce. J'eus un mouvement de recul : un Romain ! Non...c'était bien un Gaulois, comme moi. On ne pouvait s'y tromper : cette barbe blonde comme les blés, cette tignasse mal arrangée, cet accoutrement fait de peaux et de toile de chanvre...Je ravalais mes sanglots. Un homme ne pleure pas! m'avait dit Papa un jour. Surtout pas face à un étranger, ajoutai-je mentalement.
L'homme semblait jovial : le visage rond sans être joufflu, des yeux pétillants d'intelligence et de malice, un sourire jusqu'aux oreilles, et un léger embonpoint commun à la plupart des bons vivants amateurs de Cervoise.
" - Bien le bonjour, jeune marin solitaire ! Est-ce que ça va mieux?
- Comment? Qu'est-ce que...
- Tu es ici chez moi, sois le bienvenu ! J'ai vu une barque dériver le long de la rivière tandis que je pêchais, et je me suis dit qu'elle me serait bien utile pour traverser la rivière si je souhaitais m'éviter le grand détour par le pont du village de Dijonix.
Je la croyais vide, j'ai donc été plus que surpris de t'y trouver endormi, les vêtements roussis et tachés de sang.
- Oui, mon village...les Romains. Papa, mes frères...morts.
- Oh, je suis vraiment désolé pour ce qui est arrivé, dit l'Inconnu d'un air sincère. J'ai vu de la fumée s'élever de derrière la forêt tout à l'heure, et j'ai fait le rapprochement avec toi. J'ai donc décidé de t'emmener à la maison pour que tu puisses te reposer et reprendre des forces.
- Je ne vais pas rester longtemps...Il faut que je retrouve Maman et mes soeurs ! Les Romains ont dû les enlever !"
Le visage de l'Inconnu palît sensiblement tout à coup :
"- Hé bien...peut-être vaudrait-il mieux attendre demain avant de faire quoi que ce soit : la nuit va tomber rapidement, et ces Romains doivent déjà être loin. Que dirais-tu d'une grosse tranche de pain et d'un poisson grillé? J'ai fait quelques bonnes prises aujourd'hui."
L'homme me fit un clin d'oeil amical. Il avait raison... Je ne le connaissais pas, mais il m'inspirait pourtant naturellement confiance. Quoiqu'il en fût, je n'avais nulle part d'autre où aller pour la nuit, et j'étais affamé !
Je tentais d'esquisser en vain un triste sourire de gratitude :
" - Merci beaucoup de votre hospitalité, monsieur...
- Oh, pardonne-moi ! J'ai oublié de me présenter : mon nom est Infamix. Et toi?"
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